Sur demande d'un confrère, voici un topo sur la réharmonisation et les substitutions qui vont être utiles à cette dernière. On va faire ça en plusieurs étape pour laisser le temps de digérer chaque info.
Désolé d'avance pour le pavé mais c'est pas simple de synthétiser de telles infos.
Tout d’abord qu’est-ce que la réharmonisation ? C’est tout simplement la possibilité de modifier une grille d’accord par une autre en remplaçant/supprimant/ajoutant certains accords par d’autre sans modifier l’harmonie du morceau.
Quel peut être l’intérêt de ce procédé ? Et bien tout simplement de se réapproprier un morceau, de l’interpréter à sa façon et d’apporter plus de variété dans les accords ou au contraire de simplifier sa grille.
C’est très intéressant à la fois dans la reprise de standards car en changeant quelques accord on peut étoffer de nouvelle mélodie ; dans la composition car les banals couplets/refrains avec les mêmes accords ça peut vite être saoulant, donc là on va juste modifier quelques accords pour apporter quelques changements ; et enfin dans l’improvisation une fois de plus pour varier son jeu ou simplifier une grille pour soloter sur une seule gamme et pas 50..
Quelles sont les limites de la réharmonisation ? AUCUNE ! Tout est permis tant que l’on respecte les outils de réharmonisation, que l’on colle avec le thème du morceau et qu’on respecte l’éventuelle mélodie déjà en place.
Afin de rester clair et concis, je vais à chaque fois indiquer la technique de substituions utiliser, donner un exemple concret sur une grille en Do majeur et expliquer brièvement le pourquoi du comment.
Afin de suivre un minimum ce topic il faut un minimum de connaissance sur les degrés d’une gamme et sur la composition d’un accord.
Arrêtons le blabla et place aux exemples.
1. La substitution diatonique.
2. La progression par quarte ascendante
3. La substitution tritonique
4. La dominante secondaire
5. Les accords diminués
6. La substitution chromatique
1. La substitution diatonique
C’est la plus simple et la plus courante. Vous l’utilisez souvent sans le remarquer.
Comme ce qui suit nous allons nous baser sur la gamme de Do majeur.
Je rappelle rapidement les 7 degrés
I CM7
II Dm7
III Em7
IV FM7
V G7
VI Am7
VII Bm7b5
La gamme est donc composée de 3 fonctions principales :
La fonction tonique (T): C’est le degré I qui remplit cette fonction en toute logique car c’est le point de repos de cette gamme. En regardant la composition de l’accord (CEGB). On a que des intervalles forts entre chaque note et aucune tension particulière mis à part la septième.
La fonction dominante (D): C’est le degré V qui remplit cette fonction. Si on regarde la composition de cet accord de plus près (GBDF) on remarque qu’il contient un intervalle de quinte diminué (ou quarte augmenté au choix) soit 3tons entre la tierce majeure B et la septième mineure F.
Cet intervalle s’appelle le triton (à cause des 3 tons) et est la base de tous les mécanismes de tension harmonique que l’on rencontre dans une grille d’accord. Si on regarde ces notes par rapport à notre degré I, le F est la quarte et le B la septième majeure. C’est justement parce que cette quarte veut inévitablement aller vers la tierce du degré I et la septième vers la tonique, que cet accord est si important.
On voit bien sur le schéma les 3 tons entre la tonique et le triton et entre le triton et l'octave, ainsi que le mouvement montant de la septième vers la tonique et le mouvement descendant de la quarte vers la tierce
En résumé, la D ne demande qu’une chose : se reposer sur la T. D’où l’enchainement le plus courant en musique V-I (on dit que l’on progresse par quarte ascendante)
La fonction sous-dominante (SD): C’est le degré IV qui remplit cette fonction. On a remarqué avant que la quinte est étroitement liée à la tonique et de ce fait que la progression de quarte en quarte est privilégié afin de satisfaire notre oreille sur ce jeu de tension/résolution. Mais admettons que l’on souhaite continuer à progresser en quarte à partir de la tonique, on tombe justement sur le degré IV. Il y’a donc une sorte de symétrie entre ces 3 notes.
On voit bien sur ce schéma comment la tonique (T) est coincée entre la quinte (P5) et la quarte (P4)
Maintenant que nous avons défini nos 3 fonctions il est temps de les utiliser comme outil de réharmonisation.
On a donc nos 3 degrés I, IV et V qui on leur fonction, mais qu’en est-il des quatre autre II, III, VI et VII ? Et bien on va leur attribuer également les fonctions T, D et SD.
Pour cela nous allons comparer les notes de chaque accord et vérifier lesquels ont des similitudes avec les 3 premiers pour leur donner telle ou telle fonction.
On ne va pas jouer à la devinette donc je vous les donne.
T :
I : CEGB
III : EGBD. Si on se base sur C, c’est comme si on jouait un CM9
VI : ACEG. Si on se base sur C, c’est comme si on jouait un C6
SD :
IV : FACE
II : DFAC. Si on se base sur F, c’est comme si on jouait un F6
D :
V : GBDF
VII : BDFA: Si on se base sur G, c’est comme si on jouait un G9
En pratique on peut donc substituer ou complémenter un accord par un accord de même fonction.
Exemple :
En do majeur si on a une bonne vieille anatole VI II V I donc Am Dm G C. On peut par exemple remplacer cette grille par III II V I (le III remplace le VI) ou III IV V I (le IV par le II) ou III IV V VI (le I par le VI).
Vous voyez qu’en un exemple tout bête VI II V I, on peut faire une marche harmonique qui progresse du III au VI. Idéal pour changer de tonalité entre C majeur et sa relative mineur VI par exemple.
Vous remarquerez peut être que harmoniquement parlant le bon vieux blues en IV V I et le standard II V I de jazz ont la même souche : SD --> D -->T, bref la base des bases. C'est pourquoi on retrouve si souvent ces tournures.
(pour information, sur les gammes mineurs naturelles, harmoniques et mélodiques, les mêmes intervalles représentent les mêmes fonctions ... donc I, III et VI pour tonique etc...)
En résumé, la substitution diatonique consiste simplement à remplacer un accord ou plusieurs par le/les accords de même fonction.
Sources :
Les bases de l'harmonie, Philippe GANTER